Ancienne étudiante en biologie à l’ICES (Promo 2006), Audrey Desgrange vient d’être récompensée pour ses travaux sur le cœur par le programme l’Oréal-UNESCO Pour les Femmes et la Science. Sur 900 candidates à participer au programme, seulement 30, dont Audrey Desgrange, ont pu bénéficier de cette aide.
Lundi 8 octobre, dans le cadre de la semaine de la Fête de la Science, la Fondation L’Oréal a dévoilé les 30 jeunes chercheuses lauréates de son programme L’Oréal-UNESCO : Pour les femmes et la Science France. Ces 30 lauréates se voient décerner une bourse de recherche et bénéficient d’un programme de formation au leadership, complémentaire à leur parcours scientifique, afin d’avoir les moyens de briser plus facilement le plafond de verre. Issues de tous horizons scientifiques, ces jeunes femmes ont en commun l’excellence de leur parcours et la volonté de partager leur passion pour la science.
Après avoir laissé passer quelques jours d'effervescence médiatique, nous avons pu poser quelques questions à notre ancienne étudiante de biologie.
Bonjour Audrey, peux-tu te présenter en quelques mots ?
Je m’appelle Audrey Desgrange, j’ai 30 ans et je suis chercheuse en biologie à Paris. J'ai grandi en Vendée, aux Sables d'Olonne. Enfant, j'ai toujours eu une grande curiosité pour la nature, j'observais beaucoup, je voulais comprendre « comment ça marche ? ». J'ai d'ailleurs demandé mon premier microscope à l’âge de 8 ans. Puis, en classe de 5ème, au collège Jean Monnet (Château d’Olonne), j'ai fait partie d'une classe « scientifique », animée par un professeur de SVT passionné et passionnant : Jean-Claude Daniel. Cette même année, suite à une rencontre avec des chercheurs en Mauritanie, je me suis dit : « Un jour, je serai chercheuse ».
Après une mention très bien obtenue en classe de terminale scientifique, je suis arrivée à l’ICES en licence de biologie. C’était en 2006 et je me suis penchée sur les matières de biologie cellulaire, d’embryologie et de génétique. Nicolas Le Carret et Alexandra Coradin, m’ont soutenue et encouragée dans la poursuite de mon cursus à l’université Pierre et Marie Curie, à Paris. J'ai finalement intégré le Master de Biologie cellulaire et moléculaire de l'Université Pierre et Marie Curie où je me suis spécialisée en biologie du développement. La thèse était pour moi une évidence et j'ai intégré une équipe de l'institut de Biologie Paris Seine pour travailler sur le développement rénal. Après diverses expériences à travers l’Europe, j'ai voulu approfondir un aspect de la biologie du développement qui me passionne : la morphogenèse, c'est-à-dire comment les cellules de notre corps s'organisent et se spécialisent pour former des tissus et des organes aux formes et aux fonctions spécifiques. J'ai donc rejoint le laboratoire de Sigolène Meilhac à l’institut Imagine dans cette optique.
Que fais-tu aujourd'hui ? Quels sont tes champs d'étude ?
Je suis actuellement post-doctorante dans un laboratoire de recherche affilié à l’Institut Imagine et l’Institut Pasteur. Je suis passionnée par l'étude de la morphogenèse. Dans ce contexte, j’étudie les mécanismes la formation du premier organe qui se forme lors du développement de l'embryon : le coeur. La fonction du cœur est de pomper le sang pour approvisionner le corps en oxygène et le libérer du dioxyde de carbone. Le cœur est divisé en une moitié droite et gauche qui ont une forme différente assurant ainsi une double circulation du sang vers le corps ou vers les poumons. La structure asymétrique de cet organe se met en place dans l’embryon et est capitale pour séparer les moitiés droite et gauche du cœur. Mon projet de recherche vise à décrypter les bases moléculaires et cellulaires à l'origine de la forme asymétrique du cœur embryonnaire. J’utilise principalement des technologies de pointe en génétique et en imagerie qui permettent d’étudier ce phénomène et de le suivre en trois-dimensions et en temps-réel. De cette recherche fondamentale pourrait à terme découler une meilleure compréhension de certaines malformations cardiaques de l'enfant qui touchent 1% des nouveau-nés chaque année en France.
Comment devient-on nominée par l'UNESCO ?
Dans le cadre du programme national il ne s’agit pas vraiment d’une nomination par la fondation L’Oréal l’UNESCO. Des doctorantes et post-doctorantes peuvent se porter candidates, elles proposent un projet de recherche original et qui montre également leur engagement scientifique. Cette année par exemple, 900 jeunes femmes ont candidaté à la bourse. 30 (20 doctorantes et 10 post-doctorantes) ont été sélectionnées par un jury composé de membres de l’Académie des Sciences.
Que recommandes-tu aux jeunes femmes étudiantes de l'ICES ?
Concernant les femmes de science, les jeunes filles connaissent généralement peu d'exemples, elles ont donc du mal à se projeter vers ce type de carrière à cause du manque de modèles. Je crois que l'un des messages principaux que j'aimerais leur transmettre est de croire en elles, et de se laisser guider par ce qui les anime sans se censurer mais avec persévérance. S'entourer autant que possible de gens bienveillants qui sauront leur apporter du soutien et leur donner leur chance. J’espère que nos différents témoignages pourront être inspirants pour des jeunes filles qui hésitent encore à se lancer dans cette voie.
Imagines-tu un jour revenir enseigner à l'ICES ?
J’ai gardé d’excellents souvenirs de mon passage à l’ICES en plus des amis de promo. Ce serait un grand plaisir pour moi de venir partager et échanger avec les étudiants de l’ICES. J’enseigne à l’ENS et à l’UPMC depuis plusieurs années et je serais vraiment très heureuse de venir également à l’ICES pour enseigner si l’occasion se présente !
Propos recueillis par Maxime Corré
Crédit photo © Jean-Charles Caslot pour la Fondation L’Oréal