PRÉSENTATION
Les linguistes donnent au langage une définition qui s’ajoute aux deux plus communes que sont une fonction innée d’expression humaine, ou un système de signes, le plus souvent acquis, destinés à la communication. Pour eux il est l’ensemble constitué par la langue et la parole, la langue comme système conventionnel de signes propre à une groupe de locuteurs, la parole comme appropriation individuelle de cet outil, ou plutôt de cette boîte à outils dans laquelle l’individu opère des choix personnels. C’est à ce dernier composant du langage que s’intéresse ce colloque, au double titre d’acte de parole puisqu’il est accaparement, et que par ailleurs, comme l’a montré un livre célèbre d’Austin, la parole une fois prise peut aussi être en soi un acte ou l’équivalent d’un acte. Ces deux perspectives, l’acte de parler et la parole comme acte, sont à la croisée des domaines philosophique, littéraire, linguistique bien évidemment, juridique, politique, spirituel et religieux. Le sujet est ardu, ses difficultés tenant à l’analyse de la parole par elle-même, si tant est qu’on ne pense qu’en parlant. La phénoménologie, notamment avec Merleau-Ponty, tente de donner réponse à ce problème logique que les anglosaxons appellent un bootstrapping. Mais il y a aussi une partie de l’œuvre de Wittgenstein sur l’indicible : « Ce qui s’exprime dans le langage, nous ne pouvons l’exprimer par le langage », à moins qu’on n’en croie ce qu’il en disait d’abord, que ce n’est pas grave puisque la logique du langage « se montre » dans le langage même, qui n’a rien de mystérieux : l’homme parle – et puis c’est tout. Cela fait partie de sa « forme de vie ».