Laura Le Goff, de l’ICES au Vendée Globe…

23 juin 2021

Comme un signe du destin, Laura Le Goff intègre l'ICES au sein de la promotion Éric Tabarly (1999) pour suivre un cursus de droit .

Nommée directrice générale du Vendée Globe en 2016, Laura a été classée la troisième place des "dirigeants d’entreprises du monde du sport de moins de 40 ans en France", leaders économiques de demain, par le think tank Choiseul Sport et business ; première femme du classement juste derrière Tony Parker et Édouard Donnelly, directeur général de Be sport.

Elle nous a fait l'honneur de revenir sur son parcours et de nous éclairer sur ses missions actuelles dans une interview exclusive.

Laura, pourquoi avez-vous fait l’ICES ?

Ma famille est d’origine bretonne mais nous avons beaucoup bougé puisque mon père était militaire. Nous sommes arrivés en Vendée en 1996, j’entrais alors au lycée. J’étais donc déjà à La Roche-sur-Yon quand j’ai intégré la promotion « Éric Tabarly » à l’ICES en 1999, afin d’y suivre une licence de droit. Je me suis spécialisée en droit public, mention droit des collectivités locales. J’ai choisi l’ICES, car j’avais besoin d’un environnement plus familial, d’une structure à taille humaine. Je sentais la nécessité d’un accompagnement et d’avoir du lien avec les professeurs. J’avais entendu parler de l’ICES, de son modèle, de sa renommée et de ses taux de réussite.

Que retenez-vous de votre passage à l’ICES ?

Dans mon cursus, j’ai été marquée par de nombreux professeurs... Les cours de M. Michel de Villiers, mon professeur de droit constitutionnel ont été une révélation pour faire du droit public, ainsi que les cours de droit communautaire de M. Armel Pécheul, dont je me souviens encore aujourd’hui. Cela m’a permis de comprendre le fonctionnement de nos institutions, de notre pays et donc d’aimer le droit public. Je retiens aussi la méthodologie du droit avec M. Éric Ghérardi. Pour moi qui avais un parcours littéraire, cela m’a permis de structurer mon raisonnement.

Laura Le Goff, directrice générale du Vendée Globe depuis 2016
Laura Le Goff, directrice générale du Vendée Globe depuis 2016
Laura Le Goff, 1ère femme du classement Choiseul sur les leaders économiques de demain.

Quel a été votre parcours depuis l’ICES ?  

Souvent, quand on entre en droit, il y a de grandes causes qui nous tiennent à cœur. Je voulais devenir commissaire de police et travailler plus particulièrement dans la protection infantile. Mais, après quatre années passées à l’ICES et après avoir obtenu ma maîtrise de droit public, je suis partie suivre un DESS des collectivités locales, à l’Université de Tours. Je sentais déjà que le service public était ma vocation... Au fond de moi, j’ai toujours ressenti ce besoin de me sentir utile, de servir une cause, de faire quelque chose ayant du sens ... et c’est un moteur essentiel !

J’ai expérimenté plusieurs milieux juridiques, avec des stages en cabinet d’avocat, en collectivité. C’est lors d’un stage au sein d’une société d’économie mixte départementale, Vendée Expansion, que je me suis rendu compte que l’on pouvait être en entreprise et être au service du bien commun, en l’occurrence du développement économique territorial. En 2004, on m’a proposé un poste au sein de cette structure parce que la directrice juridique était appelée à la direction du Vendée Globe. C’est comme cela que j’ai aussi appris à connaître cette belle course.

Que vous apporte le fait d’être juriste dans votre activité ?

Etre formé au Droit aide à évaluer les risques et donc à prendre des décisions, cela a développé mon intuition ! Pour le Vendée Globe, nous réalisons énormément de procédures de marché public et, pour cela, ma formation m’est vraiment utile car c’est un droit en constante évolution et on ne peut plus complexe.

Être directrice générale du Vendée Globe, c’est orchestrer l’événement et toutes ses facettes dans son ensemble. Dans le respect des objectifs qui sont définis en lien avec le Président du Vendée Globe, il faut mettre en musique les aspects sportifs, organisationnels, marketings ainsi que toute la communication autour de la course. C’est un important travail d’équipe et il faut disposer de qualités managériales indéniables afin de conduire l’ensemble des acteurs au résultat souhaité. Évidemment, la crise sanitaire m’a permis d’apprendre sur moi-même et surtout de comprendre que l’humain est essentiel.

Comprendre que l’humain est essentiel !

Quelles ont été les difficultés rencontrées et les défis à relever ? 

Si l’on m’avait dit en sortant de mes études, que je serai Directrice générale du Vendée Globe, je n’y aurais pas cru une seconde ! Cependant, en 2016 quand on m’a proposé le poste, j’ai tout de suite accepté. Je me sentais prête à relever ce sacré défi, mais cela ne veut pas dire que je n’étais pas consciente de l’ampleur du challenge. En effet, je n’avais pas de formation en management ou marketing du sport et je n’étais pas issu du milieu de la course au large. Je suis l’exemple que rien n'est impossible, à condition d’une part de beaucoup travailler, d’écouter et rester humble face aux experts, et bien entendu, de se faire un peu confiance aussi.

J’ai appris à travailler avec des gens de tous secteurs sur des sujets aussi divers que variés, et cela m’a passionné.  

Après une première édition réussie, je pensais partir sur un Vendée Globe plus simple à organiser. C’était sans compter sur la situation sanitaire que nous avons dû traverser ! Organiser le Vendée Globe 2020 avec les contraintes liées à la Covid a été un nouveau défi incroyable. Alors que tous les événements s’annulaient les uns après les autres, il a fallu réfléchir à ce qui permettrait de convaincre les autorités que nous pourrions tirer notre épingle du jeu. Il a fallu réinventer les procédures, changer les habitudes, rassurer les protagonistes de la course… Il faut bien réaliser que maintenir l’événement fut un énorme travail demandant beaucoup de résilience. Il a fallu défaire pour refaire le travail des équipes.

Heureusement, je suis d’un naturel optimiste ! Très souvent pendant cette période, je me suis dit que ma formation de juriste a été un atout considérable dans la rédaction des différents protocoles qu’il a fallu mettre en place et défendre. C’est une formation assez complète même dans un métier finalement qui semble en être assez éloigné !

Que répondez-vous à ceux qui disent que le Vendée Globe n’est plus ce qu’il a été ?               

Les grands principes de la course restent intacts depuis la création de la course : un marin, un bateau et un tour du monde sans escale et sans assistance.    

Le Vendée Globe a surtout su évoluer avec son temps sans compromettre ses valeurs originelles : elle est une course mais aussi une véritable aventure ! Bien sûr, les bateaux du Vendée Globe ont évolué au fil du temps. D’abord, parce qu’il a fallu procéder à des adaptions pour en renforcer la sécurité, mais aussi parce l’innovation est au cœur de l’ADN de cette classe de bateaux. Ont également évolué les technologies de communication qui permettent de mieux partager la course avec le public. Et, nous avons pu le constater de nouveau sur cette édition, les vacations sont devenus des rendez-vous incontournables de la course.

Le Vendée Globe est, et restera, une aventure qui fait rêver le public et les skippers eux-mêmes.

 

Directrice générale du Vendée Globe, je n’y aurais pas cru une seconde... Je suis l’exemple que rien n'est impossible, à condition de beaucoup travailler !

Laura Le Goff en conférence de presse lors du départ du Vendée Globe
Laura Le Goff en conférence de presse lors du départ du Vendée Globe

Comment gérez-vous la pression générée par l’événement ? 

Le Vendée Globe est une épreuve sportive particulièrement longue. Elle implique d’être mobilisée 3 semaines avant le départ pour la mise en œuvre d’un Village ouvert au public et aux partenaires. Ensuite, nous sommes sur le pont quasiment 7 jours sur 7. Quand on arrive à un poste comme celui de Directeur Général d’un tel événement, on ne mesure pas à quel point le travail sera intense.

Avec le temps et l’expérience, on apprend à se préserver. J’attache beaucoup d’importance à être en bonne forme physique avant le top départ de l’événement : bien manger, bien dormir, etc. L’hygiène de vie est fondamentale dans des métiers où il y a de la pression. On ne prend pas de bonnes décisions quand on est épuisé. Cela vaut quand on passe nos partiels à l'université, mais aussi dans le milieu professionnel !

Comment vous voyez-vous dans l’avenir ? 

Tant que je serai passionnée par mon métier, je poursuivrai l’aventure ! Et le Vendée Globe est une aventure humaine extraordinaire... Ainsi, je me vois de nouveau servir le Département de la Vendée pour l’organiser en 2024.

Comment voyez-vous le potentiel de la Vendée aujourd’hui ? 

Nous avons la chance d’être dans un Département qui est fier de son identité et de ses valeurs. Le Vendée Globe, tout comme le Puy du Fou, ont permis de faire grandir sa notoriété en France mais aussi à l’international. Par ailleurs et pour le bien de la course en elle-même, il me semble fondamental que le Département de la Vendée reste à la tête d’un tel événement pour en préserver les valeurs fondamentales.

 

 

Propos recueillis par Cyril Pasquier