Droit canonique
Presque la moitié du fonds Chavagnes porte sur le droit canonique, avec des ouvrages du XVIIe au XIXe siècles. L’intérêt qu’ils représentent repose avant tout sur leur contemporanéité avec certains débats religieux de ces époques sur l’administration et le fonctionnement de l’Église.
Plusieurs éléments traitent de la dispute entre les gallicans et les ultramontains à propos de l’autonomie de l’Église de France, très vive et actuelle du temps de Monseigneur Gallot. Le fonds présente plusieurs ouvrages examinant la puissance et le rôle de l’épiscopat au XIXe, tels que le Tractatus de officio et potestate episcopi de Bartolomeo Ugolini, homme de confiance de Laurent le Magnifique, ambassadeur italien en France et évêque de Gaète. Ces textes décrivent ainsi le fonctionnement et les interrogations émises par des membres du clergé ou par des laïcs sur divers points administratifs et théologiques.
D’autres livres constituent des ouvrages de référence et témoignent de l’état des collections canoniques et de l’unification de la législation ecclésiastique du temps, renforcée dès le XIIe siècle. Ces manuels, tel que cette édition de 1661, commandée par le pape Grégoire XIII, en deux volumes du Corpus juris canonici, recueil qui restera le grand fondement de la législation canonique jusqu’en 1917, se trouvent souvent agrémentés de commentaires. Ils permettent à l’historien de saisir les méthodes d’enseignement de cette discipline religieuse et les évolutions qu’elle a connues en des temps de grand changement pour l’Église. Cette édition fut commandée par Grégoire XIII ; le livre affiche un sommaire manuscrit avec les titres de parties et les numéros de page correspondants.
De nombreux ouvrages présentent des analyses de théologiens sur les Constitutions pontificales et sur les sources créatrices du droit canonique, comme le Sexte ou les Décrétales des papes. Une édition du XVIIIe siècle des Paratitla in quinque libros decretalium Gregorii IX, réalisée par Trattner, ouvre la série. L’auteur, Innocent de Ciron, fut professeur de droit civil et canon à l’université de Toulouse, ainsi que chancelier. Il publia plusieurs traités de droit canonique. Celui-ci couvre les cinq livres des Décrétales, en s’intéressant aux différents types d’offices ecclésiastiques, aux actions en justice, aux conditions de vie des prêtres et autres ecclésiastiques, notamment concernant leurs relations avec des femmes voire leur mariage, aux procédures de censure, à des cas particuliers comme celui des prêtres non baptisés ou des prêtres non ordonnés administrant les sacrements, ainsi qu’à des questions morales concernant le mariage et les naissances. Les Medulla juris canonici secundum titulos in quinque libris decretalium de Thomas Schmitz proposent des commentaires en trois volumes. Ils portent sur les offices, l’ordination, les processus judiciaires, les obligations et contrats, les mariages, etc. Les trois volumes des Commentaria in quinque libros Decretalium de Prospero Fagnani suivent le même principe. Pour des ouvrages plus précis sur les différents livres de l’oeuvre de Grégoire IX, notons les Commentaria in primum librum Sexti Decretalium du dominicain Pietro Maria Passerini, qui fut canoniste, théologien et inquisiteur de Bologne, puis consulteur du Saint Office. Sous forme de questions et d’articles, ils traitent de la Trinité, des Constitutions, des enfants de prêtres, des différents offices comme celui de légat, des offices ordinaires, des vicaires et des procurateurs.
Outre les ouvrages traitant des décrétales de Grégoire IX et de Clément VIII, d’autres pièces se tournent vers les institutions canoniques. La série de Jacob Wiestner propose plusieurs tomes sur les Institutiones canonicae sive Jus ecclesiasticum, tandis que l’oeuvre de l’abbé Roquette de Malviès, les Institutiones juris canonici publici et privati ad usum scholarum accommodatae, constitue un manuel adapté à l’étude de la discipline par des érudits et des ecclésiastiques. Les Paratitla juris canonici d’André Delvaulx représentent quant à eux le manuel classique d’enseignement du droit canonique. D’autres volumes d’Eusèbe Amort ou de Jean Cabassut complètent la collection, ainsi que les Institutiones canonicae Remigii Maschat a S. Erasmo de Remigius Maschat, dans une édition romaine de 1757. Cette oeuvre, en deux volumes, traite des institutions de droit civil et canonique, de diverses questions, tout en proposant des compléments sur les décrétales, à partir des corrections effectuées au Concile de Trente et par la suite.
Quelques autres ouvrages se penchent sur les bulles papales, tels que ceux de Stephano Quaranta et, surtout, de Laerzio Cherubini. Ce dernier propose un regroupement de portraits des papes accompagné de leur biographie et de leurs actes dans son Magnum bullarium romanum, a Clemente VIII usque ad Gregorium XV en deux volumes.
Une autre section du droit canonique s’intéresse aux procédures de justice, de jurisprudence et de droit pénal en général. L’Ordinis iudiciarii et de modo procedendi in causis criminalibus tam in foro ecclesiastico, quam saeculari Quaestiones XXX de Luis Miranda contient des écrits de pratica criminalis canonica et regularis et traite de questions sur les prélats et les visiteurs ecclésiastiques, leurs obligations, les jugements et autres éléments de procédure. La Jurisprudentiae ecclesiasticae universae en huit volumes sera un appui solide pour une étude sur le sujet. Elle s’intéresse au droit catholique dans ses différents cadres d’exercice : droit patriarchal, droit épiscopal, droit diaconal, droit dans le cadre des paroisses, droit monacal... |
Un petit groupe se consacre à l’examen des dispenses matrimoniales et du droit du mariage en général. Deux traités De dispensationibus matrimonialibus s’offrent à nous : celui de de Vincenzo Giusti, dans une édition de 1691, et celui de Pietro Giovine, dans une édition de 1863. A cela s’ajoute le Traité des dispenses en général et en particulier de Pierre Collet.
Le fonds Chavagnes recueille aussi un certain nombre de traités dédiés à l’étude des privilèges et des bénéfices ecclésiastiques. Nous pouvons par exemple citer le De privilegiis religiosorum de Rupert Grueber.
Quelques éléments se concentrent sur le droit des congrégations ; d’autres sur les procédures d’élections ecclésiastiques ; d’autres enfin sur les dispenses apostoliques. Un volume traite du jésuite Giuseppe Gibalini de la simonie universelle des prêtres.
|
Un ensemble pourrait en particulier intéresser les historiens de la Contre-Réforme et des périodes qui suivent : consacré à la législation des Conciles, avec un regard appuyé sur le Concile de Trente, il propose de nombreux commentaires d’ecclésiastiques des XVIIe-XVIIIesiècles, réalisés à la lumière des guerres de religion voire des évènements postrévolutionnaires. L’imposante série des travaux de Chrétien de Wulf, réunis sous le titre de Patris Christiani Lupi Opera omnia, nous est transmise en six volumes. L’auteur, prêtre de l’ordre des ermites de Saint-Augustin, fut un théologien et historien, issu de l’Université de Louvain. La moitié de la série se consacre aux Synodorum generalium ac provincialium decreta, et canones, illustrés par des dissertations et des études de Thomas Philippini. Le reste concerne les Ad Ephesinum Concilium variorum patrum epistolae, d’autres lettres, prescriptions et écrits posthumes.
D’autre part, la Clava pontificia seu authoritas in conciliis tum generalibus tum provincialibus d’Esteban N. Cardeira, s’appuyant sur les décrétales, traite des conciles en général. L’ouvrage s’intéresse à l’origine, à l’étymologie et à la définition des conciles, à leur nécessité, leurs conditions de convocation, aux hérésies, aux schismes et aux superstitions qui en ont fait l’objet et au rôle du Souverain Pontife. |